Résolution du Parlement européen
Situation des droits de l'homme au Tchad B6-0148/2006
Résolution du Parlement européen sur la situation des droits de l'homme au Tchad
Le Parlement européen ,
— vu l'Accord de partenariat ACP-UE, signé à Cotonou le 23 juin 2000 (Accord de Cotonou), et notamment son article 8 portant sur le dialogue politique, compte tenu de l'environnement interne (élections présidentielles de mai 2006, conflit tchado-tchadien) et de l'environnement externe (situation au Soudan et dans la région du Darfour), le Parlement européen après étude approfondie de la situation a émis une résolution sur la situation des droits de l'homme au Tchad.
Cette résolution prend en compte, les récentes élections présidentielles, l'engagement pris par la Banque mondiale de lutter contre la pauvreté au Tchad et de jeter les bases d'une croissance durable et d'œuvrer pour des perspectives de développement. Après analyse des enjeux et des risques encourus et potentiels au niveau humain, la commission a évalué les facteurs limitants comme les ressources limitées des membres de l'Union africaine pour résoudre la situation sur un si vaste territoire, l'épuisement d'aides actuelles, l'implication de l'ONU comme force de substitution au Darfour et l'instabilité politique et l'insécurité actuelle, la commission émet la résolution suivante:
Ces 35 points visent à :
* Protéger, rétablir les droits de l'homme et veiller aux générations futures.
Nous citons les propos ci-après. Le parlement,
1. se déclare très préoccupé par la situation générale au Tchad, eu égard notamment aux droits de l'homme;
2. rappelle avec préoccupation que la population civile, déjà affectée par la sécheresse et la famine, ne tire aucun bénéfice de la loi précitée et des milliards de dollars dérivés de la vente du pétrole, et souligne que les richesses pétrolières du Tchad doivent bénéficier en premier lieu aux populations tchadiennes;
3. condamne le fait que 10% des revenus du pétrole aient été annulés du fonds pour les générations futures et affectés, par la suite, à la liste des "secteurs prioritaires", dont les dépenses militaires font désormais partie;
4. demande au gouvernement tchadien d'indiquer de façon claire et transparente l'utilisation des revenus pétroliers;
5. demande au gouvernement tchadien de destiner les fonds des revenus du pétrole au développement, en particulier à l'approvisionnement en eau potable, à la santé et à l'éducation, ainsi qu'à l'organisation des élections;
6. demande au gouvernement tchadien d'établir le plan annuel pour le développement du pays et de le rendre public;
7. prend acte de la disposition de principe du gouvernement tchadien de tenir compte des avis de la communauté internationale, mais insiste sur la nécessité d'un dialogue plus profond et d'une approche ouverte;
8. se félicite de la création d'un ministère des droits de l'homme au Tchad, demande à ses responsables de collaborer avec la société civile et de concrétiser le programme d'action nationale concernant la politique des droits de l'homme, et invite la Commission à suivre de près ce processus;
9. invite le Conseil, la Commission et les États membres à faire pression sur le gouvernement tchadien afin que celui-ci renforce l'État de droit et mette un terme au climat d'impunité et aux violations des droits de l'homme, exercées notamment contre les opposants au projet de révision de la loi précitée;
10. demande au gouvernement tchadien de mettre un terme au recrutement forcé de jeunes soldats dans l'armée gouvernementale;
11. s'inquiète des actes de représailles perpétrés par les forces de l'ordre et les bandes armées envers la population et les militants de l'opposition; exhorte les forces de l'ordre et l'armée à s'abstenir de toute exaction contre la population civile et à mettre fin aux agissements des bandes armées;
12. demande à l'AMIS de procéder à des changements immédiats pour améliorer la protection des civils et démontrer qu'elle a la capacité de protéger les civils au Darfour;
13. invite le Conseil, la Commission, les États membres, les Nations unies et l'Union africaine à exercer toutes les pressions possibles sur le gouvernement soudanais afin qu'il cesse de compromettre l'efficacité des opérations de l'AMIS;
14. demande instamment au Conseil, à la Commission, aux États membres, aux Nations unies et à l'Union africaine de mettre à la disposition de l'AMIS, affaiblie par de sérieuses contraintes financières, logistiques et autres, des ressources financières, matérielles et militaires beaucoup plus importantes;
15. condamne les attaques menées par les milices "djandjaweeds" depuis la mi-décembre 2005, lesquelles pourraient opérer parfois avec l'appui du gouvernement soudanais, à travers notamment le soutien d'hélicoptères de combat, contre 40 des 85 villages de la région tchadienne de Borota, au sud d'Adré, tous désertés depuis par leurs habitants, aujourd'hui sans abri;
16. se félicite de l'accord tchado-soudanais précité, du 8 février 2006, et invite les deux États au plein respect des engagements pris;
17. invite les gouvernements du Tchad et du Soudan à contrôler plus strictement le commerce des armes légères et de petit calibre dans la région;
18. souligne la gravité du problème des mines terrestres et des munitions tirées et non explosées (UXO) dans le Sud du Soudan, et invite le Conseil, la Commission, les gouvernements du Tchad et du Soudan, les Nations unies et les autres acteurs, à procéder sans retard à la dépollution des zones minées, à l'assistance aux victimes et à l'éducation des populations face aux risques, afin de dégager les routes et de permettre aux personnes déplacées et aux réfugiés de regagner leurs foyers;
19. invite instamment le gouvernement tchadien à respecter le débat démocratique sur la situation dans le pays ainsi que sur le projet d'extraction pétrolière dans la région de Doba;
20. demande au gouvernement tchadien de fixer au plus tôt le calendrier officiel des prochaines élections, non seulement présidentielles, mais aussi législatives, en conformité avec ses obligations constitutionnelles, et de garantir l'impartialité de la commission nationale électorale indépendante;
21. est convaincu qu'un processus électoral ne peut se dérouler avec efficacité et transparence dans une conjoncture où les droits d'expression les plus élémentaires sont menacés;
22. demande, sous réserve que les conditions requises soient remplies, que l'Union européenne envoie une mission d'observation électorale au Tchad, afin de suivre et de favoriser le bon déroulement du processus électoral;
23. demande instamment au gouvernement tchadien, en rappelant le rapport de "Transparency International" du 18 octobre 2005, selon lequel le Tchad est l'un des pays les moins transparents financièrement, de lutter et de mettre fin au plus vite au phénomène de la corruption et de faire preuve de transparence dans les dépenses de l'État;
24. encourage le gouvernement à conduire des campagnes d'information concernant le déroulement des élections et à favoriser le bon déroulement de la campagne électorale d'une façon pacifique et démocratique;
25. demande instamment d'encourager d'importants et urgents progrès économiques et sociaux, notamment dans les domaines de l'éducation et de la formation, de la santé et de la sécurité sociale;
26. formule le vœu que ces avancées s'accompagnent de progrès dans les domaines de la consolidation de la démocratie, de l'État de droit et des droits de l'homme, notamment de la liberté d'expression, de la liberté d'association et de l'indépendance de la presse;
27. demande au gouvernement tchadien de créer les conditions favorables pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement fixés et adoptés par les Nations unies;
28. demande au gouvernement tchadien de mettre fin aux actes de soumission et de ségrégation de la femme et à l'exploitation du travail des enfants, et d'abolir en particulier le recrutement forcé de jeunes soldats;
29. estime que le respect des droits de l'homme et du pluralisme politique est une condition indispensable pour permettre à la population de défendre ses intérêts légitimes et de participer à la prise de décisions, et, en dernière analyse, pour combattre la pauvreté;
30. invite le Conseil, la Commission et la communauté internationale à poursuivre leur aide humanitaire et leur aide au développement en faveur des populations réfugiées du Soudan et des populations d'accueil du Tchad, et à continuer d'associer la société civile du Soudan et du Tchad comme partenaires de la paix;
31. invite toutes les compagnies pétrolières à se conformer pleinement à l'Initiative pour la transparence des industries extractives et aux principes internationaux en matière de sécurité volontaire; invite la Commission à surveiller ce processus dans le cadre de ses politiques relatives à la responsabilité sociale des entreprises;
32. demande que M. Hissène Habré, l'ancien dictateur du Tchad refugié au Sénégal depuis 1990, soit enfin jugé en Afrique, ou alors extradé et jugé en Belgique en vue d'un procès juste et équitable, selon la Convention internationale contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants des Nations unies;
33. demande à l'Union africaine d'assumer ses obligations, dans le cadre du procès de M. Hissène Habré, afin d'éviter les critiques de la communauté internationale;
34. demande à la Commission d'entreprendre un dialogue politique structuré au sens de l'article 8 de l'Accord de Cotonou et d'informer la commission du développement de l'avancée et des résultats de ce dialogue;
35. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements des États membres, au Conseil des ministres ACP-UE, aux Présidents, aux gouvernements et aux parlements du Tchad et du Soudan et à la Banque mondiale, ainsi qu'à l'Organisation non gouvernementale "Association tchadienne pour la promotion et la défense des droits de l'homme" (ATPDH).
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